De 2019 à nos jours: Mathias Kabeya atterit malgré les turbulences [Tribune du Prof. Alphonse Mulumba]

De 2019 à nos jours: Mathias Kabeya atterit malgré les turbulences [Tribune du Prof. Alphonse Mulumba]
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Après ce parcours, Mr le Gouverneur

C’est depuis avril 2021 que la province du Kasaï oriental est sans gouverneur titulaire, démocratiquement élu selon les textes qui régissent la fonction. Les reliefs de la destitution afférente, légale, mais contestée par les fanatiques de l’ancien premier homme Est- Kasaïen sont connus: status quo dans plusieurs domaines, lancements multipliés des projets et poses de premières pierres, une rhétorique de développement à l’habituel alors que le panier de la ménagère reste déplorable. Hormis l’éveil de Kinshasa prouvé par la lente implémentation de quelques chantiers dans la province, il sied de s’interroger: combien de projets de grande envergure sont l’apanage propre du gouvernement provincial?

Les prix du carburant, de l’eau et des produits alimentaires de première nécessité se chevauchent en flambée. Bref, le coût de vie est élevé.

La victorieuse déchéance du poisson d’Avril 2021 s’est transposée en onze mois de crampes: Maweja a dégagé mais la province a toujours du mal à s’éclore. Il est même difficile de juger si le fameux qualificatif ‘’d’incompétence notoire’’ qui avait fait couler le navire Djunes était en hibernation ou n’a jamais été submergé. La réalité reste la même: nous souffrons des mêmes maux.

En lune de miel gouvernemental, les visites hebdomadaires des chantiers et descentes sur terrain de l’administration Longa étaient aussi éphémères que la durée de combustion d’une bougie. Elles étaient des calmants qui ont su atténuer la douleur et la déception du peuple, sans toutefois le guérir.

Treize mois plus tard, nous voici revenus à la normale, à la case de départ. Pire encore, pendant ce temps où certains s’efforçaient de venir à terme avec le départ de leur maître, et que d’autres s’entretuaient en exhibant leur éloquence sur les ondes radiophoniques, le cancer de la souffrance se métastasait. Maintenant, il est fort palpable des portes de l’aéroport de Bipemba jusqu’aux derniers villages dans nos territoires.

A l’heure actuelle, l’enfant Est- Kasaïen ne vit que de l’espoir renouvelé: ça va aller, ça va changer. En partie, cet espoir émerge du récent choix des candidats gouverneur et vice-gouverneur par la force politique dominante, l’Union Sacrée. Ce choix est un atterrissage, qui nous rappelle des turbulences connues pendant le vol: emprisonnement à ciel ouvert (de Kinshasa) de l’ancien maître du perchoir provincial, jets d’insultes parmi les locataires de l’hémicycle provincial, balades judiciaires pour déjouer destitution et invalidation, multitude des candidatures, sondages truqués, décoration de la ville de Mbujimayi par des plancardes, l’émergence des candidats indépendants considérés comme désobéissants au parti du Leader Maximo, des justifications et déshabillements intellectuels signés ‘’Kabuya’’, guerres des ‘’États-Majors’’, création d’un nouveau parti ‘‘rénové’’ à la cuisine Civuila… Nous n’oublierons jamais les multiples descentes des Kinois-Kasaïens. Pire de tous: la désacralisation des portes de la Cathédrale de Bonzola par les mamans soupçonnées aux couleurs Mukeba.

Le voyage a été long, même le Béton de la Cité de l’Union Africaine en a fait preuve de frustration.

Un pilote atterrit

Je suis de ceux qui pensent qu’il faut tout de même faire un atterrissage forcé, donner la chance au nouveau pilote, lui faire confiance, le laisser paisiblement gouverner pour le reste de cette période transitoire vers 2023. Sauf en cas de faux calcul politique, le nouveau pilote sera Mr Patrick Mathias Kabeya Matshi Abidi.

Le surnommé ‘’Mwalimu’’ était clair: ‘’Les gens ne sont pas les mêmes, les gens n’ont même pas le même nom […] Il y a des Kalonji et des Mutombo. On ne peut pas comparer un Kalonji à un Mutombo. Un Mutombo reste Mutombo et un Kalonji reste un Kalonji’’. Malgré cette diversité, dit-il, ‘’ce n’est pas facile, c’est pourquoi les gens sont traumatisés’’.

Que demande-t-on alors à notre Kabeya? Que doit-il faire pour nous délivrer de ce traumatisme? Ma réponse est simple: qu’il dirige avec tête et cœur.

Parlant de tête, il en a. Dans le langage ivoirien, ‘’il connait papier’’. Son parcours d’apprentissage est comparativement une distinction. Il a oscillé entre le ‘’school of thought’’ américain et ‘’l’école de pensée’’ française. La qualité de son éducation est incontestée.


Si ‘’notre Kabeya’’ pouvait galvaniser ses connaissances en leadership, business et autres domaines, pour tracer une ligne intelligente de conduite pour les quelques mois à venir, il jouira du soutien et de l’amour de plusieurs. Je parle d’une action gouvernementale intelligente, une vision cohérente, des indicateurs clés de performance, et la clarté d’un bref plan de société. Nous diriger avec la tête demande de s’imprégner des réalités de notre province, et prendre des décisions rationnelles, avec une équipe inhabituelle des penseurs ‘’hors-boite’’ qui n’ont pas peur d’emprunter des chantiers inexplorés. Licencié de formation, qu’il licencie quand l’intérêt général est en jeu.

En outre, ce court mandant marquera plusieurs s’il est exercé avec cœur et d’un leadership de compassion, un leadership de proximité. Les Est-Kasaïens ne prétendent plus: ils se rappelleront toujours des temps tristes de calamités, incendies, disparitions humaines, accidents, (et autres) qui arrivent et affectent plusieurs, parfois à la muette de la chaise provinciale. Diriger avec cœur c’est porter cette population au fin fond de soi, l’aimer pour ce qu’elle est, la servir et vivre avec elle. C’est avoir un minimum de compassion pour elle.

Telle est la nouvelle donne pour que la cendre des trois dernières années ne contamine la virginité gouvernementale du nouveau citoyen premier.

Tel est le remède qui brisera le parcours caractérisé par plusieurs d’incompétent, de décevant.

Telle est la subsistance de l’espoir Est-Kasaïen, qui se fait lire dans les yeux en larmes de nos jeunes chômeurs.

Loin d’être traité de Djalleliste, qu’un Mutombo demeure Mutombo, qu’un Kalonji demeure Kalonji et que le Kabeya demeure Kabeya, sachant bien que son mandat reste l’espoir de tous; mon espoir.

Professeur Alphonse Mulumba

Rédaction

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