RDC–Rwanda : un accord de paix… Espoir sincère ou nouveau mirage diplomatique ?

Le 26 juin 2025, à Washington, dans une relative discrétion mais avec une portée symbolique immense, la République Démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda ont signé un accord de paix censé tourner la page de décennies de conflits meurtriers, de méfiance mutuelle et de drames humains. Un geste diplomatique fort, certes, mais qui suscite autant d’espoir que de scepticisme.
Car dans l’Est de la RDC, la guerre n’a jamais été un lointain écho. Elle est une réalité quotidienne, palpable, brutale. À Goma, Rutshuru, Beni, Bunagana, les populations ont appris à survivre au rythme des tirs, des exodes, et des promesses trahies. Le M23, dont le soutien par Kigali est régulièrement documenté par des rapports onusiens, symbolise ce conflit enraciné, dont les motivations dépassent les clivages ethniques pour s’enraciner dans une course effrénée aux ressources.
Le Kivu, riche en minerais stratégiques, notamment le cobalt, se retrouve au cœur d’une géopolitique mondiale. Ce métal alimente les batteries des téléphones, des voitures électriques, et les ambitions écologiques des puissances industrielles. Mais à quel prix ? Tandis qu’Apple, Tesla ou Samsung surfent sur la vague verte, dans les mines congolaises, ce sont des enfants qui creusent, des femmes violées qui fuient, des villages qui disparaissent dans l’indifférence.
L’accord signé à Washington promet monts et merveilles : respect de l’intégrité territoriale, retrait des troupes étrangères, démobilisation des groupes armés, fin du soutien logistique au M23 et à l’AFC, cette nouvelle nébuleuse militaire accusée de continuer la terreur au Nord-Kivu. Mais à quoi bon signer si l’impunité règne ? Si les circuits de contrebande minière restent intouchés ? Si les seigneurs de guerre s’invitent à la table des négociations, pendant que les victimes, elles, attendent encore réparation ?
La paix véritable ne peut se construire sur l’oubli ni sur l’impunité. Elle exige justice, reconnaissance et volonté politique. Elle suppose que les ressources du Congo profitent enfin à ses enfants, et non aux multinationales et aux circuits illicites. Elle exige que le Rwanda, souvent pointé du doigt, cesse de jouer double jeu, pour enfin restaurer sa crédibilité régionale.
Mais la paix, aussi lointaine soit-elle, n’est pas une chimère. Elle est une nécessité urgente. Un impératif pour permettre à la RDC de renaître, pour que ses écoles rouvrent, que ses routes se construisent, que ses femmes accouchent dans la dignité et non dans la peur. Une chance aussi pour le Rwanda de s’engager sur la voie de la réconciliation durable.
La communauté internationale ne peut plus se contenter de déclarations. Elle doit surveiller, imposer des mécanismes de vérification rigoureux, sanctionner les violations, et surtout, soutenir les forces vives locales : société civile, journalistes, enseignants, défenseurs des droits humains. Car la paix se tisse dans les actes du quotidien, pas seulement dans les signatures protocolaires.
En RDC comme au Rwanda, les peuples aspirent à autre chose qu’aux bruits des armes. Ils réclament la paix, la vraie. Celle qu’on forge dans les villages, qu’on enseigne dans les écoles, qu’on protège dans les marchés, et qu’on nourrit dans les foyers.
Il revient à chacun d’agir : États, citoyens, entreprises, médias. Car la paix vaut plus que le cobalt. Parce qu’aucun progrès technologique, aucune richesse minière, ne justifie qu’on sacrifie des vies humaines.
Ghislain Ilunga Kandolo pour une opinion libre