Accord congolo-rwandais : Symphorien Ndibu salue l’initiative mais exige la poursuite des auteurs de massacres

La signature de l’accord de paix entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, intervenue vendredi 27 juin à Washington sous l’égide des États-Unis, continue de faire couler beaucoup d’encre. À Mbujimayi, province du Kasaï oriental, l’analyste politique indépendant Symphorien Ndibu n’a pas caché sa satisfaction face à cette avancée. Lors d’une interview exclusive accordée à coulisses.net samedi 28 juin, il a appelé à la rigueur dans l’application des engagements, notamment en matière de justice.
« Nous saluons à cœur joie l’accord qui vient d’être signé par la RDC, mon pays, et le Rwanda sous l’œil vigilant des États-Unis. Cet accord marque le début d’un décollage pour notre pays, un décollage qui peut impacter toute l’Afrique. Le potentiel économique de la RDC, une fois mis en valeur, pourra impacter le devenir économique du continent », a-t-il déclaré.
Pour Symphorien Ndibu, cet accord pourrait ouvrir une nouvelle ère pour la RDC, marquée par la reconstruction, le développement, et la souveraineté retrouvée.
« Le Congo ne pouvait pas se développer avec une partie de son intégrité agressée. La guerre dont nous sommes victimes est une guerre de prédation, une guerre des minerais. Le Rwanda, avec les impérialistes occidentaux, venaient prendre les minerais par le sang. Ils tuent, violent, massacrent les Congolais et exploitent les ressources », a-t-il fustigé.
L’analyste remet également en question la justification historique de la présence rwandaise dans l’Est du Congo.
« Le Rwanda justifiait sa présence à l’Est du pays par la traque des FDLR. Ces FDLR étaient curieusement recherchés autour des mines d’or et de coltan. Ce qui est une comédie tragique », a-t-il dénoncé.
Parmi les clauses de l’accord, celle relative au respect de l’intégrité territoriale des États suscite un grand espoir à ses yeux.
« Nous nous frottons les mains, parce que nous allons récupérer autant de territoires et autant de gisements qui étaient sous occupation de l’agresseur rwandais. Le désengagement militaire, les seigneurs de guerre, et le M23 qui se prétendaient être forts, qui pensaient avoir le soutien du Rwanda, n’auront pas d’avenir », a-t-il assuré.
Cependant, Symphorien Ndibu émet de sérieuses réserves quant à l’éventuelle intégration dans l’armée régulière de certains éléments responsables de crimes.
« La faiblesse de l’accord, c’est qu’on veut que les troupes soient intégrées. Mais on ne peut pas intégrer des gens qui ont massacré, qui ont semé la désolation d’armes sans justice. Signer l’accord est une réalité, l’appliquer en est une autre. Ce qui est important, c’est que tous ceux qui ont des dossiers doivent être poursuivis et doivent payer cher. Ceux qui ont massacré les Congolais ne doivent pas jouir de l’accord, ils doivent répondre de leurs actes », a-t-il martelé.
Il estime par ailleurs que l’implication des États-Unis dans ce processus constitue un gage de sérieux.
« Les accords déjà signés entrent dans l’histoire. Les États-Unis, hier parrains et bras droit du Rwanda, changent de posture. La chance que nous accordons à cet accord, c’est l’ombre qui le couvre, celle des États-Unis. En faisant signer cet accord, les États-Unis et d’autres investisseurs veulent entrer par la porte officielle de la RDC en vue d’exploiter les minerais. Ils gagnent et nous gagnons aussi », a-t-il expliqué.
Selon l’analyste, cet accord repose sur un équilibre d’intérêts qui pourrait assurer sa réussite.
« Ils vont faire régner la paix à l’Est pour amener leurs investissements. La RDC aussi accepte cet accord pour récupérer ses territoires et profiter des retombées. Il y a une grande chance de réussite pour cet accord », conclut-il.
Enfin, il attire l’attention sur les ambitions géoéconomiques américaines qui, selon lui, se concrétisent à travers ce partenariat.
« Les États-Unis obtiennent la grande part des droits miniers congolais. Trump veut dire que les États-Unis se frottent les mains d’avoir gagné le marché au Congo par rapport aux autres. Le potentiel économique extraordinaire de la RDC est convoité par plusieurs pays du monde », a-t-il affirmé.
Enock MUTEBA MAZELA